RALLYE RAID : DAKAR 2025 – SANDERS sans partage, BACIUSKA première
Le voyage du retour à Bisha pour achever l’expédition de la 48h chrono dans le nord-est de la ville imposait un passage de près de 90 kilomètres dans les dunes grises qui en ont fait voir de toutes les couleurs à certains.
Les autos et camions se sont ensuite engagés dans des canyons somptueux, où les pistes étroites ont permis au Lituanien Rokas Baciuska d’exprimer son agilité. Côté moto, le finish s’est joué sur un enchaînement de haut-plateaux et de secteurs dunaires sans pièges techniques, sur lesquels Daniel Sanders, parti 7ᵉ ce matin, a pu ouvrir les gaz pour remonter la file de ses rivaux et signer un troisième succès consécutif sur le Dakar 2025.
- Le test majeur de la 48h chrono a été passé avec les honneurs par Daniel Sanders, vainqueur du prologue et des deux premières étapes. Toutefois, il n’augmente que légèrement son avantage au général, avec 12’36 » d’avance sur Skyler Howes, le podium provisoire étant complété par Ross Branch (à 12’40 »).
- L’élite de la course motos reste très imprégnée de rouge, avec les Honda de Howes, Schareina (4ᵉ), Brabec (5ᵉ) et Van Beveren (6ᵉ) présentes aux six premières places.
- Yazeed Al Rajhi, qui avait tout perdu sur la 48h chrono en 2024, pensait avoir signé le meilleur temps au cumul des deux jours, mais c’est Rokas Baciuska, recrédité après l’étape du temps perdu à un ravitaillement défectueux, qui s’impose pour la première fois de sa très jeune carrière, à 25 ans. Ce qui n’empêche pas le pilote saoudien de jouer à nouveau aux avant-postes. L’autre bonne opération du jour est réalisée par Henk Lategan, en vue sur le prologue et qui prend maintenant les commandes du classement général grâce à sa 2ᵉ place. Nasser Al Attiyah reste en embuscade malgré une pénalité de 4′ (excès de vitesse), 3ᵉ dans la hiérarchie.
- Les débats de Bisha ont mis en difficulté Sébastien Loeb, auteur d’un rapproché sur la deuxième journée mais pointé à 13’08’’, et surtout Carlos Sainz, victime des conséquences en cascade de son retournement acrobatique sur l’étape 2A. Il accusait à l’arrivée un retard de 1h28’, mais la déformation de son arceau de sécurité l’a obligé à quitter le Dakar.
- Il n’était pas cité parmi les favoris les plus en vue de la catégorie, mais le Néerlandais Paul Spierings a surpris son monde sur la 48h chrono, à commencer par Nicolas Cavigliasso, le collectionneur cette fois-ci privé d’étape pour 2″, mais sans le déloger du fauteuil de leader.
- Les Polaris assoient leur domination sur ce début de Dakar en SSV, avec une étape remportée par Brock Heger qui s’ajoute à son succès sur le prologue et à celui de Xavier de Soultrait sur la première étape. Les deux hommes occupent les deux premières places du général, le Français en tête, avec déjà plus d’une heure d’avance sur Alexandre Pinto, 3ᵉ.
- Un trio de prétendants s’est détaché sur la 48h chrono, avec Martin Macik, Ales Loprais et Vaidotas Zala qui ont achevé dans cet ordre le gros morceau de cette première semaine. Ils ont notamment distancé Mitchel van den Brink, pointé à 1h16’ à la 4e ligne du classement général.
Les rebondissements, c’est un peu la spécialité de Rokas Baciuska, qui avait notamment vécu l’expérience amère de voir Eryk Gokzal profiter de ses problèmes mécaniques la veille de l’arrivée du Dakar 2023, dont il dominait le classement des SSV jusqu’à la dernière étape. Cette année, après trois titres conquis consécutivement en W2RC, le pilote lituanien s’attaquait à son grand défi en prenant le départ en Ultimate, une suite logique à l’éclosion de son talent. Mais dès la première étape, son enthousiasme l’a poussé à la faute et surtout à une sortie de piste qui a arraché une roue arrière de son Hilux. Le jeune homme dont tout le monde a compris qu’il était le véritable Harry Potter ne s’est pas démobilisé et a profité de sa 38e place au départ de la 48h Chrono pour enclencher le turbo de son balai « Firebolt ». Après deux jours et près de 1000 kilomètres, il s’impose dans la catégorie reine et vient confirmer une tendance lourde de la 47e édition du Dakar. Le tableau d’honneur a vu circuler les noms de Seth Quintero (22 ans), Saood Variawa (19 ans), Corbin Leavertone (24 ans) et Mitchel van den Brink (23 ans). À 25 ans, Baciuska, qui aurait presque pu être le plus jeune vainqueur de l’histoire de la catégorie, fait déjà figure de grand frère !
Il a plus pour habitude de planter des banderilles sur le dos de ses adversaires que de les recevoir. Le quadruple vainqueur du Dakar et tenant du titre Carlos Sainz a mordu la poussière hier au kilomètre 327. Un tonneau dont « El Matador » s’est relevé froissé mais pas résigné. Avec un Raptor minimaliste dépouillé de la majorité de ses éléments de carrosserie mais aussi de son parebrise, le duo Sainz-Cruz est reparti à l’assaut des 640 km de spéciale restant à parcourir. À l’arrivée à Bisha, l’Espagnol qui accuse 1h35’ de retard sur le nouveau leader du Dakar se voit dans l’obligation de rendre sa cape. Son pick-up, inspecté par son équipe M-Sport, n’est plus en mesure d’assurer sa sécurité en piste. Après l’abandon sur double tonneau de Laia Sanz avant-hier, Cristina Gutiérrez et Nani Roma ont été contraints de quitter la spéciale aujourd’hui. Les deux derniers repartiront respectivement avec 48 et 52 heures de pénalité, mais l’Espagne est touchée en plein cœur. Pour adoucir leur peine, il faut se plonger dans les statistiques du roi Carlos et s’accrocher au dicton « jamais deux sans trois » : les deux dernières fois que Sainz a quitté l’arène du Dakar avant l’arrivée, il s’y est imposé pour son retour. En 2022 avec Peugeot, en 2024 avec Audi. Rendez-vous donc en 2026…
« Chucky » est en feu ! Après avoir remporté le prologue et l’étape 1, Daniel Sanders a ajouté une troisième victoire consécutive à son palmarès sur la 48h chrono. Parti 7ᵉ ce matin, 7′ après Tosha Schareina, Sanders a rattrapé les leaders en piste pour garder un œil sur eux et ainsi contrôler la spéciale pour s’imposer. Un triplé comme celui-ci, c’est du jamais vu chez les motos depuis 2017, quand Joan « Bang Bang » Barreda avait remporté les étapes 8, 10 et 11. Mais les enjeux sont très différents. À l’époque, Barreda ne jouait plus la victoire au général après une pénalité d’une heure pour un ravitaillement hors zone en première semaine. Libéré de la pression, il avait pu attaquer sans retenue sur les étapes suivantes, malgré des pistes parfois difficiles en raison de fortes pluies en Amérique latine, mais avec la responsabilité d’ouvrir la piste ! Sanders, lui, est en plein dans la bataille pour le titre et gère son effort, montrant qu’il peut non seulement attaquer, mais aussi maîtriser.
Sébastien Loeb : « C’était à bloc partout »
« On n’en espérait pas tant aujourd’hui. Hier pour nous, on avait abandonné, on n’arrivait plus à avancer, on avait déjà perdu 40 minutes. On a fait 900 km de WRC quand la voiture marchait. C’était à bloc partout et finalement on a réussi à recoller à la tête de la course aujourd’hui. On reprend pas mal du temps que l’on avait perdu, c’est plutôt pas mal. »
Si la 5ᵉ édition du Dakar Classic marque l’avènement de véritables spécialistes pour qui la victoire est devenue obsessionnelle, il en est quatre qui ont décidé de venir avant tout pour le côté émotionnel. Les Néerlandais emmenés par Erik van Loon, ancien animateur du Dakar avec comme fait d’armes une 4ᵉ place en 2015, sont les seuls véhicules engagés en H4, la catégorie avec la moyenne de vitesse la plus haute. Réservée aux véhicules les plus rapides ou les plus récents, ils animent une véritable course dans la course… au plaisir ! Replica des deux Audi Quattro Dakar 1985 engagées entre les mains expertes de Bernard Darniche et Xavier Lapeyre, développées sur la base des Groupe B de WRC de l’époque développant près de 600 ch, ces versions Dakar sont dotées « seulement » de 500 ch… pour 1350 kg. Un beau clin d’œil à Audi, tenant du titre du Dakar 2024 pour la première fois de l’histoire.
Le règlement 2025 FIM du W2RC récompense désormais les équipes d’assistance des pilotes Rally 2 par un titre Team. Un pendant à celui des constructeurs (réservé aux équipes officielles) et dont BAS World KTM Racing est le candidat désigné par ses premiers jours de course. En Rally 2, en effet, Edgar Canet domine pour le moment les débats, mais le Catalan est engagé au sein de l’équipe KTM officielle. Or, il faut être au minimum deux dans une équipe pour marquer des points à ce nouveau classement par équipe. Et pour le moment, derrière la révélation espagnole de 19 ans, on trouve trois représentants de l’équipe néerlandaise : Michael Docherty, Tobias Ebster et Mathieu Dovèze. L’équipe satellite Honda RS Moto était bien partie pour jouer les outsiders avec Jacob Argubright et le nouveau venu Paolo Lucci. Mais sorti hier sur chute, l’Italien laisse l’Américain seul capable de défendre le rouge, Romain Dumontier, un peu comme Canet, étant seul au sein du Honda Team soutenu par le HRC.
Une compétition s’achève, et une autre aventure commence pour les participants à la première édition de Saudi Next Gen. Et ce sont finalement deux équipages qui reçoivent ce soir la bonne nouvelle de leur victoire, puisque Hamza Bakhashab comme Abdullah Alsheqawi, respectivement âgés de 21 ans et de 27 ans, ont gagné leur engagement sur le Dakar 2026 en compagnie de leurs copilotes Raed Alassaf et Fahad Alamr. Après cinq jours de tests, de compétition et de cours durant lesquels leurs talents se sont exprimés, Eduardo Mossi, en accord avec A.S.O., la fédération automobile saoudienne (SAMF) et le ministère saoudien des sports (SMC) ont finalement décidé de récompenser les deux équipages les plus méritants. « J’ai été impressionné par ces jeunes, se réjouit l’ancien pilote italien. Ils me rappellent la détermination que je mettais pour progresser lorsque j’avais leur âge. Et surtout, je suis ravi que les deux pilotes que je n’arrivais pas à départager aient la possibilité de continuer à poursuivre l’objectif qui les fait rêver. Hamza et Abdullah sont très différents à la fois par leur tempérament et leur style de pilotage, mais ont tous les deux un potentiel que j’ai envie de voir fructifier ». Pour la préparation de leur échéance, ils seront suivis tout au long de l’année sur les quatre manches du championnat saoudien, où ils retrouveront pourquoi pas leurs compagnons de piste des cinq derniers jours. En effet, Fahad Al Marmash comme les féminines Fatma Banaz et Merehin Albaz se sont montrés suffisamment convaincants pour croire en leurs chances dans l’avenir. Le rallye-raid est toujours une affaire de patience et de persévérance.