VOILE : Benjamin Ferré a passé le Cap Leeuwin
En 37 jours de mer, Benjamin Ferré (IMOCA Monnoyeur-Duo for a Job) a passé plusieurs caps : celui de Bonne-Espérance, Leeuwin, et bien d’autres, plus invisibles mais tout aussi importants dans sa construction de marin.
Benjamin Ferré n’avait jamais passé autant de temps seul en mer. En 37 jours et plus de 20 000 kilomètres parcourus, le Breton de 34 ans, avide de découvertes, a beaucoup appris sur son bateau, Théophile, et sur lui-même :
« L’Indien m’en a appris assurément bien plus long sur moi que tous les autres océans, tant il m’a résisté. »
« Une jolie trace »
Il lui a résisté mais lui a aussi apporté une certaine satisfaction : « Ce qui m’a procuré le plus de plaisir, c’est d’observer la carte et de voir les villes, les pays, les continents qui s’y dessinent. C’est vraiment extraordinaire de voir les Kerguelen, l’Afrique, l’Inde, Madagascar, se dire qu’on est en train d’avancer sur la longitude de la Chine… Plus spécifiquement, je suis super content de la trace que j’ai faite sur l’océan Indien. J’avais vraiment à cœur de faire une jolie trace. »
« Comme une tristesse de premier amour » Une histoire qui se termine bien. Et pourtant, sur cet océan déchaîné, avec des nœuds qui montent et montent encore, son Imoca souffre. Le 15 décembre dernier, Benjamin a même cru que son Vendée Globe était terminé. « Il est 19h05 T.U. J’écrirai sur le groupe Telegram de mon équipe technique : « Alerte ! Une pièce du vérin hydraulique vient d’exploser. Le bateau est couché. Huile partout. Je sécurise et vous reviens ! Merdeeeeeeeeeeeeeeeeee !! » Débutera alors, probablement, un épisode de ma courte vie de marin qui aura successivement vu passer mon plus grand cri de désespoir et peut-être ma plus grande fierté, celle d’être encore debout, encore en course, encore là autour du globe. C’est de loin mon pire moment. J’avais vraiment le cœur brisé. C’est vraiment difficile à expliquer. Comme une tristesse de premier amour. C’était vraiment horrible, une tristesse inconsolable. »
« Tu rajeunis de 24 heures » Une tristesse qui s’est transformée en pleurs de joie quand il découvre que sa réparation a fonctionné. « Ce que je retiens aussi, ce sont ces 2 Caps que j’ai passés, on ne me les enlèvera pas. Et là, j’ai hâte de passer l’antiméridien. Pour moi, c’est vraiment symbolique du Vendée Globe, cette espèce de sensation de gagner 24 heures dans la vie ; en l’espace d’une seconde, tu passes d’un méridien à l’autre et tu rajeunis de 24 heures. » Et la suite ? « Ce qui nous attend devrait être moins pire que ce qu’on vit depuis 15 jours ». 21e au classement provisoire et 2e bateau à dérives, cette course dans la course, Benjamin Ferré se rapproche de la moitié de son épopée. En toute humilité. « La nature s’en fiche qu’on soit là ou pas là, elle fait sa vie et ça ne dérange personne. Les albatros jouent avec la force du vent, tout le monde est très à l’aise là-dedans et nous, pauvres petits humains, on vient s’y confronter avec nos gros egos, nos gros bateaux qui font énormes sur les pontons mais qui ici sont vraiment minuscules. C’est une belle leçon ». Une leçon qu’il est bien décidé de continuer à apprendre.