VOILE : Loïs BERREHAR et Charlotte YVEN, la Solitaire des gens heureux !
Cette 55e édition de La Solitaire du Figaro Paprec restera gravée dans les mémoires des deux skippers Macif.
2e au général avec deux victoires d’étapes, Loïs a vécu sa toute dernière avec Macif avec une envie décuplée de viser les étoiles. 5e, Charlotte, a accroché un podium d’étape et confirmé son talent et sa volonté farouche d’atteindre le meilleur niveau. Ils se confient dans cette interview croisée. Et parce que ce beau binôme, vainqueur de la Transat Paprec 2023, n’a encore pas dit son dernier mot : ils participeront au Championnat du Monde Off-shore en double mixte du 24 septembre au 1er octobre prochain à Lorient !
Alors heureux ?
Loïs Berrherar (Skipper Macif 2022) : « Oui je suis très content ! Il y avait quand même un petit espoir de passer devant Tom Dolan, mais sincèrement, je ne pouvais pas rêver mieux. Une étape dans la brise pour la dernière de cette édition, c’est ce dont je rêvais. J’étais ultra motivé pour plusieurs raisons : j’étais déçu de ma deuxième étape, je sentais malgré tout que je pouvais faire encore mieux et que le classement final était jouable. Et puis, cette victoire sur la première étape m’a littéralement galvanisé. Je savais qu’après toute cette énergie engrangée, je pouvais donner le meilleur sur l’ultime étape. C’était un peu le plan que je m’étais dessiné : faire un beau parcours côtier, être devant, et le rester jusqu’à la fin. »
Charlotte Yven (Skipper Macif 2023) : « Je suis super fière, super heureuse de ma saison, d’avoir performé et de m’être bagarrée jusqu’au bout. Pour moi, le circuit Figaro est devenu ma grande famille. J’ai tout donné, pris un immense plaisir. Je suis tellement heureuse… »
Que retenez-vous de cette 55e édition de La Solitaire du Figaro ?
Loïs Berrehar : « Je n’oublierai jamais cette édition. Pour moi, c’est l’édition de la concrétisation. J’avais évidemment des objectifs personnels, je voulais montrer ce que je valais, et j’avais à cœur pour la Macif de tout donner pour cette dernière. J’avais déjà fait un podium l’an dernier, mais je voulais à tout prix gagner une étape. Au final, j’en gagne deux, c’est fantastique ! Je n’ai aucun regret, c’était presque de l’ordre de l’impossible, et j’ai réussi. C’est motivant, je me dis que j’ai ma place pour avancer encore. En plus, cela s’est fait entre marins que j’apprécie énormément. Basile (Bourgnon) est un bon copain, il a eu un rôle important, depuis que je suis tout petit. Cela m’a toujours poussé vers le haut de naviguer contre lui. Il m’a poussé dans mes retranchements sur cette Solitaire, c’était ma locomotive. »
Charlotte Yven : « J’ai rempli mon objectif de l’année. J’ai beaucoup travaillé pour cela. Je m’étais fixé des choses à établir, j’ai coché les cases. Je me sentais enfin à mon niveau, là où je voulais être. Toutes ces petites choses que j’ai travaillées mises bout à bout font que ça a marché. Je me suis enfin fait confiance, je suis très fière et heureuse. Inconsciemment aussi, ces Jeux Olympiques m’ont transporté. J’ai tout donné cette année pour faire quelque chose de bien sur la Solitaire, comme beaucoup d’athlètes qui veulent réussir. C’est une énergie incroyable ! Vive le sport, vive les Jeux ! »
Tout le travail en amont a payé ?
Loïs Berrehar : « Je suis arrivé là où je voulais. C’est ce que j’aime dans ce sport de manière générale, c’est le défi permanent pour, sans cesse, sortir de sa zone de confort. Je n’ai fait que progresser, m’améliorer. Il n’y a pas une journée où je n’ai pas pensé à donner le meilleur de moi-même. Comme tous les athlètes finalement. Les Jeux Olympiques sont porteurs de flamme, et cela m’a sans doute porté moi aussi. Quand j’ai franchi la ligne d’arrivée de la dernière étape, j’ai vu 7 ans de ma vie défiler. »
Charlotte Yven : « Je me suis donné tous les moyens pour réussir, et ce grâce à la Macif. Disposer d’un bateau bien préparé, d’entraînements à haut niveau, cela change la donne. Mais surtout, je me suis mise dans la tête chaque jour, toute l’année, de réussir. C’est un choix de vie, c’est dur parfois, il faut de la volonté. C’est un long chemin pour y arriver, mais je crois qu’à force de me mettre des petits objectifs, je suis parvenue à aller là où je voulais être. »
On a le sentiment qu’il y a eu un maximum de plaisir… On parle d’addiction à La Solitaire, pourquoi ?
Loïs Berrehar : « La Solitaire c’est du pur plaisir tout le temps parce que tout se joue dans le détail. C’est le match qui est addictif, la bagarre. Et puis, on sait chaque fois que rien ne se passe comme prévu. Il y a aussi de la souffrance. Dans les muscles et dans la tête… C’est une histoire d’équilibre. Il faut réussir à aimer la douleur. Les contraintes deviennent un plaisir. Réussir une Solitaire, cela veut dire beaucoup de contraintes personnelles, mais cela en vaut la chandelle. »
Charlotte Yven : « Ce qui est addictif, c’est que tu vas chercher le meilleur de toi-même. Tu vas au bout de toi-même. C’est dur, il y a sans arrêt une part d’incertitude, mais c’est ce qui fait la beauté de La Solitaire. »
Peut-on parler pour chacun d’entre vous de l’année de la maturité sur le circuit ?
Loïs Berrehar : « L’année de la maturité est arrivée pour moi l’année dernière. J’ai réalisé un podium, j’aurais pu arrêter après. Mais j’avais envie de faire mieux et grâce à la Macif, j’ai eu une année « bonus », une année pour aller encore plus loin. »
Charlotte Yven : « Oui j’ai pris de la maturité, c’est sûr. Je ne me dis plus qu’un podium est inaccessible. Je peux désormais me fixer des objectifs que je sais atteignables. 5e sur une Solitaire avec un podium d’étape, c’est génial. »
Un mot pour le vainqueur Tom Dolan ?
Loïs Berrehar : « C’est encore une belle histoire la victoire de Tom. C’est un marin que j’apprécie beaucoup. Nous avons commencé le Figaro Bénéteau tous les deux en 2018. Il arrivait du Mini et moi du multicoque. Nous avons démarré en même temps sur la Transat AG2R. J’ai tout de suite vu qu’il était super fort, super enthousiaste. Il avait peut-être un manque de confiance en lui, mais il était bourré de qualités en mer. Je suis sincèrement heureux pour lui, même si évidemment j’aurais aimé le battre. C’est un beau vainqueur. »
Charlotte Yven : « Je suis fan de Tom. Il navigue bien, j’aime sa manière de faire les choses en mer. Il tente toujours des petites options et il n’est pas du genre à rester dans le peloton. C’est comme ça que je vois les choses aussi. Essayer, tenter, faire selon son instinct. »
Vous partez ensemble avec Loïs faire le Championnat du Monde Off-shore en double mixte… C’est une belle manière de terminer la saison ?
Loïs Berrehar : « Charlotte voulait faire ce championnat. Avec elle, chaque course en double est un bonheur. Plus qu’une collègue, c’est une sœur. Quand elle est arrivée sur le projet Macif, elle avait beaucoup à apprendre, mais elle a cette volonté farouche d’engranger de l’expérience, de prendre du plaisir à naviguer. Notre objectif commun était de gagner la Transat Paprec. Elle a su s’adapter à fond pour que l’on parvienne à notre objectif. Elle m’apporte son énergie, sa bienveillance. Sincèrement, je suis persuadé que ce ne sera pas notre dernière collaboration tous les deux. »
Charlotte Yven : « J’ai envie que cela ne s’arrête jamais de naviguer avec Loïs. Parce qu’ensemble, on forme une belle équipe. J’ai déjà la nostalgie ! Oui, ce championnat sera forcément fort et on aura à cœur de bien faire. »
Que vous êtes-vous apportés l’un à l’autre ?
Loïs Berrehar : « Grâce à la Macif, j’ai rencontré un binôme incroyable. J’avais tout de suite vu ses qualités : passion, envie, enthousiasme. J’ai vite senti son potentiel. Elle a un truc, un feeling que d’autres n’ont pas. Elle est également très humble et toujours de bonne humeur. Pour moi, c’est énorme ! »
Charlotte Yven : « Loïs m’a tout appris. De la manière de faire une belle trajectoire, à comment faire cuire des œufs en bateau ! Il m’a donné tous ses secrets. Il m’a dit comment régler mes voiles, comment aller vite, comment vivre en solitaire sans dormir, comment donner le meilleur de moi-même. J’ai pris confiance grâce à lui. C’est mon frère, mon meilleur conseiller. »
Quels sont vos objectifs sur ce championnat ?
Loïs Berrehar : « Se qualifier sur la finale ! On fait ce Championnat du Monde pour représenter notre pays. Notre fédération nous suit, c’est un beau challenge. Personnellement, je souhaite prendre un maximum de plaisir sur l’eau. »
Charlotte Yven : « Se qualifier bien sûr ! Et surtout, pour notre dernière course ensemble de la saison, donner le meilleur, profiter à fond. Même si dans un coin de ma tête, ce ne sera certainement pas la dernière fois que l’on régatera en binôme… »