VOILE : Route du Rhum-Destination Guadeloupe – François GABART : « Je suis très excité »
Aux commandes du Trimaran SVR-Lazartigue, François Gabart prendra dimanche le départ de la 11e édition de la mythique Route du Rhum-Destination Guadeloupe, épreuve en solitaire entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre.
Avec de légitimes ambitions mais surtout l’envie d’offrir à son bateau et à toute son équipe de belles émotions.
« Dans la vie d’un marin ce sont des moments exceptionnels, uniques. » Dimanche, à 13h02, quand Francis Le Goff, directeur de la course, à bord du navire amiral, donnera le départ de la 11e édition de la Route du Rhum, François Gabart coupera la ligne posée au niveau de la Pointe du Grouin avec une énorme détermination. Mis à l’eau en juillet 2021, le trimaran SVR-Lazartigue, bateau volant skippé par François Gabart, a très vite montré tout son potentiel avec une deuxième place dans la Transat Jacques-Vabre (en duo avec Tom Laperche). Une nouvelle histoire est à écrire dans cette Route du Rhum. « Il y a tous les ingrédients pour faire une super course, pour que ce soit difficile et que l’on vive un grand moment de sport et de course au large avec de belles luttes », prédit François. Avec tous les faits de course envisageables sur une course comme la Route du Rhum – Destination Guadeloupe. « Tous ces bateaux ont beaucoup progressé mais c’est de la course au large. Le risque fait partie de la difficulté et de la beauté de ce sport. Quand on part de Saint-Malo en novembre, pour traverser l’Atlantique, les conditions sont souvent difficiles dans l’Atlantique nord. C’est rare qu’il ne se passe rien. C’est le sel de la course au large. C’est complexe mais c’est aussi pour ça qu’on aime ça. Je souhaite évidemment que ça se passe le mieux possible, qu’il y ait le moins de casse possible. On a progressé mais on est à l’abri de rien. Ça reste compliqué de traverser l’Atlantique quand on veut le faire le plus vite possible. »
Après avoir heurté un morceau de bois pendant le convoyage vers Saint-Malo, le 24 octobre, le Trimaran avait d’ailleurs abimé sa nouvelle dérive. Tout est rentré dans l’ordre. « C’est bon, rassure le skipper. La dérive a été réparée à Concarneau (dans les ateliers de Mer Concept) où beaucoup de monde s’est mobilisé. Elle est arrivée mercredi à Saint-Malo et a été mise dans le bateau le soir-même. C’est une bonne nouvelle car cette nouvelle version de la dérive installée l’été dernier a beaucoup progressé par rapport à la première. »
Tout est donc réuni pour de grands moments de voile. « Dans notre catégorie, il y a huit super bateaux, des super marins avec des super équipes. Il y a tout pour que ce soit incroyable. Je me rends compte de la chance que j’ai de vivre ça cette année. Évidemment je veux gagner, c’est une compétition. Mais le chemin est au moins aussi important. J’espère qu’à l’arrivée il y aura des sourires, des émotions et beaucoup de belles histoires à raconter. »
«.. une grande motivation, beaucoup d’énergie, un supplément d’âme… »
Le solitaire, « un saut dans le vide »
Tous les skippers le répètent à l’envi. S’ils seront seuls à bord pendant la Route du Rhum, rien ne serait possible sans leur équipe. « Derrière un bateau, il y a une équipe, beaucoup de monde qui mouille le maillot, des gens qui en ont bavé, appuie François Gabart. Il y a beaucoup de questionnements, beaucoup de challenges à relever, des gens qui ont pris des risques comme mon partenaire SVR-Lazartigue et Didier Tabary. Quand je pense à tous ces gens qui ont cru à ce bateau, qui ont travaillé pour ça depuis plusieurs années, avec parfois des moments durs, des risques, des sacrifices, ça me donne une grande motivation, beaucoup d’énergie, un supplément d’âme. À titre personnel, je suis très content de refaire la Route du Rhum car c’est à chaque fois nouveau. Mais j’ai avant tout envie de faire vivre cette Route du Rhum à ce bateau. Il a été conçu pour ça. C’est mon job aujourd’hui de faire en sorte qu’il puisse vivre un bon moment. Ce bateau mérite de faire la Route du Rhum. »
« Le solitaire est un exercice particulier. J’ai eu la chance d’en faire beaucoup entre 2016 et 2018 en enchainant plusieurs courses : la Transat anglaise, ma première course en solo, puis le tour du monde en 2017 et la Route du Rhum en 2018. Avec les entraînements et la qualification, c’est un exercice que j’ai réappris à apprécier. C’est un privilège de faire la Route du Rhum et de naviguer sur ces bateaux en solo. C’est difficile, mais c’est assez fascinant. Je suis super heureux de revivre ces sensations et de retrouver cette envie que j’avais quand j’étais plus jeune. Je ne m’y attendais pas vraiment. Je ressens à nouveau cette sensation de saut dans le vide que l’on a quand on part en solitaire. Je suis très excité. »
Une météo « musclée » dès lundi
La Route du Rhum : l’Histoire de la course au large
Depuis plusieurs jours, tous les skippers et leur cellule de routage (en ce qui concerne le trimaran SVR-Lazartigue : Jean-Yves Bernot, l’habituel météorologue de François Gabart, et Tom Laperche, co-skipper lors de la Transat Jacques-Vabre et skipper remplaçant) analysent avec beaucoup de minutie les modèles météo à leur disposition pour tenter de définir la bonne stratégie. « La situation est assez classique d’un début de novembre, explique Gabart. Dimanche, pour le départ, nous devrions avoir un vent de sud-ouest et des conditions maniables. Il devrait ensuite y avoir un grand flux d’ouest sur tout l’Atlantique nord. Nous aurons donc beaucoup de mer quelle que soit l’évolution des systèmes. Lundi, on s’attend à un front assez actif. J’attends que les prévisions se confirment, mais le front passe très tôt et il risque de ne pas y avoir d’échappatoire. » Un front qui inquiète bon nombre de marins, principalement dans les catégories de bateaux moins rapides. « Si les conditions ne sont pas raisonnables pour naviguer dans certaines zones, on adaptera nos stratégies, avance le skipper du Trimaran SVR-Lazartigue. Nous sommes vigilants. » Difficile donc dans ces conditions d’envisager d’améliorer le record de l’épreuve, détenu depuis la dernière édition par Francis Joyon (IDEC Sport) en 7 jours 14 heures 21 minutes et 47 secondes (7’08’’ devant François Gabart, alors sur son trimaran MACIF). « Ce n’est pas impossible car nos bateaux sont très performants, même au près, mais il est clair que ce ne sont pas des conditions favorables pour battre le record », confirme le skipper.
Lancée pour la première fois en 1978, la Route du Rhum relie Saint-Malo à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. La distance de cette transatlantique organisée seulement tous les quatre ans est de 3542 milles (environ 5700 km). Pour cette édition 2022, 138 solitaires prendront le départ dans six catégories : Class 40, Imoca, Ocean Fifty, Rhum Mono, Rhum Multi, Ultime.
Vainqueur en 2014 en IMOCA (à la barre de MACIF), deuxième en 2018 en Ultime, François Gabart fait partie de la grande histoire de l’épreuve. Une histoire marquée par les victoires de grands noms de la course au large comme Mike Birch, vainqueur de la première édition en 1978 et récemment disparu, Loïck Peyron (2014), Michel Desjoyeaux (2002), Laurent Bourgnon, deux fois vainqueur (1994 et 1998) ou encore Florence Arthaud (1990) etc. « Gagner la Route du Rhum marque la vie d’un marin mais aussi d’un armateur, assure Didier Tabary, président du groupe KRESK. C’est sans doute la plus belle des transatlantiques. »
La sortie des écluses
La sortie des bateaux de la Classe Ultime des bassins de Saint-Malo vers leur point de mouillage à Dinard se tiendra en principe dans l’après-midi. Les conditions météorologiques, notamment des rafales de vent au-dessus de 15 nœuds, rendent le passage de l’écluse du Naye délicat pour ces bateaux géants, avec un vent perpendiculaire. Les Ultime quitteront donc Saint-Malo en fin de journée ou dans la nuit de vendredi à samedi pour rejoindre Dinard, juste en face de Saint-Malo, dernière halte avant le départ, dimanche.

















