VOILE : Vendée Globe 2020, un top 10 au max !
J+83 : entre Mar del Plata (Argentine) et Vigo (Espagne)
À retenir :
- V and B – Mayenne, le bateau qui a enfin fait son grand tour
- Une flotte de grande qualité
- Des matches à tous les étages !
La 10e place de Maxime Sorel (10e) est venue clôturer ce matin 58 heures absolument folles dans le chenal des Sables d’Olonne. Elle vient aussi confirmer les progrès de la flotte IMOCA, qui va tenir en haleine les passionnés du Vendée Globe pendant un bon mois encore.
2 jours, 10 heures, 45 minutes et 29 secondes après Yannick Bestaven et son temps compensé, Maxime Sorel (V and B – Mayenne) a pris la 10e place de ce Vendée Globe. Il y a quatre ans, le 10e était Arnaud Boissières, qui était arrivé 32 jours après le vainqueur, Armel Le Cléac’h. Puisqu’il faut considérer que l’édition 2016-2017 avait été exceptionnellement rapide en tête de flotte, notons alors qu’il y a 8 ans, Tanguy de Lamotte, 10e également, avait mis 20 jours de plus que François Gabart, et que Raphaël Dinelli avait eu besoin de 41 jours de plus que Michel Desjoyeaux en 2008-2009.
Que V and B – Mayenne ait coupé la ligne d’arrivée est, pour ses créateurs, un vrai réconfort. Il aura donc fallu que ce bateau porte les couleurs d’une chaîne de cavistes pour que s’éteigne la malédiction qui frappait ce bateau baptisé au lait un jour de septembre 2007, et pour qu’il conclue finalement un tour du monde d’une seule traite. Kito de Pavant (Groupe Bel) en 2008, Thomas Ruyant (Le Souffle du Nord) en 2016, avaient subi des coups du sort, le premier encaissant un démâtage dans le golfe de Gascogne, le second renonçant après un choc avec un Ofni au large de la Nouvelle-Zélande alors qu’il brillait de mille feux dans les hauteurs du classement. Même en compagnie de Seb Audigane lors d’une Barcelona World Race, Kito de Pavant avait été contraint à l’abandon.
La fin heureuse du Vendée Globe de Maxime Sorel vient confirmer une première salve de conclusions. D’abord, la scénographie météorologique a dicté sa loi. Ensuite, la qualité globale de la flotte IMOCA n’a eu de cesse de progresser depuis que la classe a compris qu’elle ne pouvait plus se permettre de revivre une édition comme celle de 2008, qui avait enregistré plus d’abandons (19) que d’arrivants (11). Le travail effectué en profondeur par la classe, tout comme par les équipes, a permis d’accompagner la fiabilisation des bateaux. Et même s’il ne faut pas porter la poisse à ceux qui sont encore en mer, on peut affirmer que la densité du plateau et la présence de 15 marins encore sur l’eau, hors des mers du Sud, permettent de donner son agrément à l’idée que les IMOCA anciens – même ceux de l’édition 2008-2009 – ont su élever leur niveau de performance tout en restant fiables. Enfin, les marins ont poussé également l’étendue et l’ampleur de leurs compétences multiples. 15 en mer et des matches partout
Ils sont 15, oui, toujours étalés entre les côtes argentines et les côtes portugaises. Ari Huusela (Stark) poursuit en compagie d’Alexia Barrier (TSE – 4myPlanet) une remontée dictée par un régime anticyclonique, avec une barrière de haute pression qui se dresse dans leur route, à 24 heures. Positionné à 5 751,7 milles des Sables d’Olonne au classement de 15 heures ce samedi, le Finlandais est à une grosse trentaine de jours de mer de la ligne d’arrivée.
1 500 milles plus loin, Clément Giraud (Compagnie du Lit – Jiliti), Miranda Merron (Campagne de France) et Manuel Cousin (Groupe Sétin) tiennent une des premières clés du suspense des prochaines semaines : 247 milles séparent le 23e du 21e.
1 000 milles plus haut, Didac Costa (One Planet One Ocean), Pip Hare (Medallia), Stéphane le Diraison (Time for Oceans), Alan Roura (La Fabrique), Kojiro Shiraishi (DMG Mori) et Arnaud Boissières (La Mie Câline – Artisans Artipôle) se tiennent en 382 milles. Même pas une journée à 16 nœuds. Le match devrait connaître son issue entre le 10 et le 12 février, selon les ETA provisoires de Christian Dumard.
600 milles devant environ se joue une empoignade entre Jérémie Beyou (Charal), 14e et Romain Attanasio (Pure – Best Western), dans la plus pur tradition – fort récente mais riche de péripéties – du match entre foils et dérives droites. On l’imagerait volontiers comme le combat entre le thrace et le mirmillon, au temps des gladiateurs. A vous de choisir l’accoutrement qui vous paraît le plus adapté à Jérémie Beyou et Romain Attanasio…
A 1 133 milles du but, Clarisse Crémer négocie le passage de la dépression 2 qui vient s’abattre sur le golfe de Gascogne. La navigatrice de Banque Populaire X, première femme au classement, a coupé entre les îles des Açores. A l’avant de ce phénomène très actif, Clarisse doit et va connaître des heures musclées. La dépression lui promet 38 nœuds de vent et des vagues de 8 mètres, au plus fort, ce dimanche. Ce ne sera pas une partie de plaisir, mais elle aura de l’eau à courir, contrairement à Armel Tripon (L’Occitane en Provence), qui s’est sagement recroquevillé le long des côtes de la péninsule ibérique pour laisser passer le plus gros de cette dépression (plus de 50 nœuds de vent et plus de 10m de vagues). Saura-t-il trouver un interstice pour se glisser entre cette dépression et celle qui concerne Clarisse Crémer ? Sera-t-il contraint à attendre un jour de plus ? Le skipper de L’Occitane en Provence doit choisir son scénario dans la soirée. De cette décision dépendra le jour de son arrivée : le 1er février, ou bien le 2.
ILS ONT DIT…
« Les dernières 72h, c’était une course contre-la-montre. J’ai pris seul la décision de passer devant cette dépression. La Direction de Course m’a averti que c’était chaud, qu’il allait y avoir beaucoup de vent et de mer, que ça allait être compliqué de passer la ligne et de rejoindre le chenal. Il y avait beaucoup de choses qui faisaient que je devais attendre, mais je voyais que ça passait, j’avais envie d’arriver aussi. J’ai mis toutes les choses sur la table, et je me suis dit “ J’y vais”… et je suis là. J’ai cravaché jusqu’au bout, j’étais au-dessus de mes routages. J’étais à 105 % de mes polaires ! Malheureusement, je n’ai pas pu me rendre compte de ce que j’ai vécu. Je n’ai pas eu le temps de réfléchir à ma course. J’ai démarré la course en large en 2014, là où V and B m’a rejoint. La Mayenne nous a rejoints un an et demi avant le départ du Vendée Globe. Nous ne sommes pas nombreux dans l’équipe, nous n’avons pas beaucoup de moyens. On est allé rêver une première fois autour du monde. J’ai envie d’aller faire plus, j’aime la compétition, j’aimerais être au contact des bateaux de devant. Je serai au départ du Vendée Globe 2024 avec un bateau à foils. On a le souhait de continuer ensemble, on a un magnifique dragon dans les voiles pour vaincre la mucoviscidose. »
Maxime Sorel, V and B – Mayenne
« C’est vraiment chouette d’être dans l’Atlantique. Je vais vérifier, mais je crois que je ne suis plus dans les Quarantièmes, je retrouve peu à peu le monde civilisé de l’Atlantique que je connais bien. Je récupère de ce cap Horn et de ces derniers jours qui ont été éprouvants.
Il y a des passages de grains de temps en temps, mais ça n’a rien à voir du point de vue de l’intensité, de la violence, de l’ambiance, de l’état de la mer, de la couleur du ciel, la forme des nuages, la température, etc. Tout change. Je découvrais un monde totalement étranger auquel j’ai dû m’adapter, c’est vraiment très différent de ce qu’on connaît en Atlantique.
Je n’ai pas trop eu de sentiment de solitude. J’essaie de ne pas trop y penser sinon ça risque de me rajouter une charge émotionnelle supplémentaire. Sam Davies et Ari Huusela ne sont pas très loin de moi, je me suis toujours concentrée là-dessus. Sinon, tu peux vite perdre les pédales et paniquer. J’ai juste senti quelque chose que j’avais rarement ressenti en mer, c’est de ne pas comprendre pourquoi c’était sans cesse aussi intense et violent. Avant le passage du cap Horn, ça ne s’est jamais arrêté pendant 10 jours. Il y avait toujours entre 30 et 50 nœuds avec 7 mètres de creux. C’était n’importe quoi ! »
Alexia Barrier, TSE – 4myplanet
« Les conditions ne sont pas très drôles depuis hier car la mer est de face donc ça saute un petit peu, ce n’est pas très agréable, mais on avance dans la bonne direction ! Je ne suis pas ridicule en termes de vitesse par rapport aux autres, je suis content. C’est un bon début de remontée de l’Atlantique Nord pour l’instant.
La route est encore longue, on doit faire un gros contournement des Açores, ça va être assez long, mais on a du vent jusqu’au bout, c’est une bonne nouvelle. Dans 10 jours, on devrait être arrivé, si tout se passe bien. La météo change souvent, on ne va pas encore ouvrir le champagne. On se rapproche tous les jours un peu plus de la maison, ça fait du bien au moral. Il commence à faire de plus en plus frais, on sent qu’on arrive bientôt à la maison. J’ai suivi les premiers, c’est important de savoir où on en est dans la course. C’est dur d’accepter que la course soit finie pour certains et pas pour nous. Ça a été une fin de course à la fois étrange et super belle. Elle restera gravée. Très beau finish et ça va encore s’enchaîner car il y a plein de pelotons différents dans la course. Pour l’organisation, ça va être encore synonyme de nuits blanches, mais pour nous ça va être très intense. Je trouve que c’est un beau Vendée Globe sur l’aspect ‘arrivées’. »
Alan Roura, La Fabrique
« Ce matin, la carte postale est belle. Je suis dans mon cockpit en train de prendre mon café en terrasse. Ce qui est beaucoup moins sympa, c’est qu’il y a beaucoup de grains à gérer, notamment la nuit, donc ce n’est pas facile de trouver le sommeil. J’ai eu une remontée de l’Atlantique Sud très compliquée, la météo est dure à gérer, c’était très usant au niveau physique car j’ai énormément manœuvré pour regagner le Nord et ne rien lâcher parce que Miranda (Merron) et Clément (Giraud) derrière ne lâchent rien non plus, ça nous booste. J’ai voulu mettre du charbon, mais c’est fatigant. Je commence à regarder un peu plus devant, la prochaine étape plus compliquée sera le pot-au-noir dans environ 3 jours. Suivant si on voit la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine, il me reste plus ou encore une transat Jacques Vabre car j’ai passé la latitude de Salvador de Bahia cette nuit. A l’échelle du Vendée Globe, je serais plutôt tenté de dire qu’il me reste plus qu’une transat Jacques Vabre, mais en même temps il y a encore quelques bonnes journées de navigation. J’essaie de ne pas penser à l’arrivée pour l’instant sinon j’ai peur que les journées me paraissent longues. »
Manuel Cousin, Groupe SÉTIN
CLASSEMENT
15:00 (heure française)
[…]
11. Armel Tripon, L’Occitane en Provence, à 471.92 milles de l’arrivée
12. Clarisse Crémer, Banque Populaire X, à 661.27 milles du 11e
13. Romain Attanasio, Pure – Best Western ®, à 1 417.59 milles du 11e
14. Jérémie Beyou, Charal, à 1463.2 milles du 11e
15. Jean Le Cam, Arnaud Boissières, La Mie Câline – Artisans Artipôle, à 2 091.56 milles du 11e